12/01/2013
La guerre au Mali
Ainsi la France s’est décidée à s’engager au Mali, il le fallait : Des rebelles qui regroupent non seulement les djihadistes d’Aqmi et du Mujao, mais aussi, semble-t-il, les touaregs indépendantistes du Mnla et Ansar Dine marchaient vers le sud Mali et auraient probablement atteint Bamako, étant donné l’état de déliquescence de l’armée malienne.
Nous risquions de voir se constituer un état islamiste dans une zone où nous avons de nombreux intérêts et des ressortissants.On ne peut d’ailleurs que remarquer l’approbation générale en France et à l’étranger et le soulagement africain.
Il n’en demeure pas moins que si on peut penser que nous allons arrêter la progression des troupes rebelles vers le sud, la reconquête du nord Mali n’est pas pour demain. D’abord il faudra attendre la fin de la saison des pluies et d’autre part on ne peut être sûr que les forces de la Cedeao puissent faire plus que reconquérir les villes. L’éradication du terrorisme dans cette zone désertique, c’est une autre paire de manches.
La solution passe comme le dit l’Algérie, par des négociations avec les mouvements indépendantistes touareg non islamistes pour aboutir soit à la partition du Mali soit à une large autonomie des régions touareg. Les touareg sont les plus à même de chasser les djihadistes du Mali, au risque d’ailleurs qu’ils aillent s’installer dans le sud Libyen.
La président Hollande qui avait déclaré la fin de la Françafrique, est soudain engagé simultanément au Mali, en Centrafrique et en Somalie, les réalités s’imposent et il n’était pas nécessaire de compliquer les choses en Syrie. Remarquons d’ailleurs que l’affaire malienne est une métastase de notre intervention en Libye. Kadhafi quoi qu’on en pense, maintenait une forme d’ordre dans la région, nous n’avons rien gagné à sa disparition.
La deuxième remarque que l’on peut faire, c’est l’intérêt d’avoir des moyens prépositionnés sur place et des troupes entrainées et connaissant ce genre de milieu en nombre suffisant. Plus que des moyens très sophistiqués et couteux, il faut du matériel robuste et adapté à cette forme d’engagement. On ne voit pas la nécessité du Félin et même du Rafale. Le livre Blanc en gestation pourrait en tenir compte.
A notre engagement actuel en Afrique, il faut ajouter la lutte contre la piraterie dans l’océan Indien et dans le golfe de Guinée.
Pour ce qui est du Mali une concertation avec l’Algérie serait certainement plus utile que toute forme de repentance.
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30/12/2012
La fin de la Françafrique
Le 20 juin 1990 à La Baule, au sommet de la francophonie, François Mitterand liait l’aide aux pays africains à l’instauration de la démocratie. Dans divers pays, comme le Rwanda, le Centrafrique…, les scrutins amenaient au pouvoir les ethnies les plus nombreuses mais qui jusque là n’étaient pas dominantes. Le cas le plus connu est le Rwanda où les Hutus arrivèrent au pouvoir alors que les Tutsis, 10% de la population, avaient toujours gouverné. C’est la cause du génocide.
Sans en arriver là, certains pays furent durablement déstabilisés, et les coups d’état se multiplièrent. Généralement la France intervenait et rétablissait une sorte de stabilité.
François Hollande a décidé que c’était terminé et que la Françafrique avait vécu, si bien que, au Mali et maintenant au Centrafrique, nous regardons l’arme au pied, les troubles s’installer encourageant les organisations africaines à intervenir.
Malheureusement il est à craindre que d’autres puissances prennent notre place de gendarmes, Algériens et Américains au Mali par exemple, Chinois ailleurs.
Mais nous avons encore de nombreux intérêts en Afrique et beaucoup de ressortissants. Il faudrait les défendre d’autant qu’au fond nos anciennes colonies ne souhaitent pas le désengagement français.
Pendant ce temps là nous sommes intervenus en Libye, où règne maintenant le désordre et intervenons en Syrie pour éliminer al-Assad, en soutenant une opposition largement suscitée, alors que nous n’y avons aucun intérêt.
On se demande quels sont les ressorts de notre diplomatie.
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26/12/2012
Comment chasser les islamistes du Mali?
Pendant sa visite en Algérie, il semble que le Président Hollande se soit laissé convaincre par Bouteflika que la solution du problème malien passait par une négociation entre Bamako et le les Touareg du MNLA et d’Ansar Dine qui se réconcilieraient pour obtenir une solution politique tenant compte de l’incompatibilité ethnique entre les populations du nord à dominante Touareg et les populations noires du sud, majoritaires. Il s’agirait soit d’une partition soit d’une large autonomie du Nord.
En cas d’accord, les Touaregs renforcés par les forces du colonel Ag Gamou repliées au Niger et appuyés par l’Algérie seraient capables de chasser les islamistes de Aqmi et du Mujao, de Tombouctou et de Gao avec le risque qu’ils migrent vers l’est et s’installent dans le sud de la Libye faisant liaison avec les islamistes de Boko Haram au nord du Nigeria.
Mais parallèlement la France semble mettre en place une force d’intervention mandatée par l’Onu et sous les ordres du général François Lecointre, regroupant l’armée malienne et la force de la Cedeao (3300 hommes). Cette force ne pourrait intervenir qu’après la saison des pluies en septembre-octobre 2013 avec peu de chance de succès n’étant pas accoutumée aux régions désertiques.
La première solution, laisser les Touaregs régler le problème avec une aide fournie par l’Algérie, la France voire les Etats Unis est assurément la meilleure mais ce n’est pas celle que la France a fait voter à l’ONU et qu’elle soutient encore.
Si la France en est capable, il va falloir qu’elle choisisse.
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24/11/2012
Mali:L'indécision française peut-elle déboucher sur la création d’un « Sahélistan » ?
Nous avons plusieurs fois évoqué la situation au Mali et la nécessité pour la France de ne pas laisser s’y installer un foyer terroriste sous la coupe de AQMI et des islamistes djihadistes. Bernard Lugan vient de publier dans son blog son analyse de la question.
« Au mois de janvier 2012, au Mali, la résurgence d’une crise née au moment des indépendances, imposait de fixer l’abcès afin d’éviter sa dissémination et pour ensuite le traiter en profondeur à travers trois volets :
- Politique, en prenant en compte la légitime revendication des populations nordistes, notamment celle des Touareg,
- Diplomatique, en faisant comprendre à l’Algérie que si ses intérêts régionaux n’étaient à l’évidence pas ceux de la France, les nôtres ne s’effaceraient pas devant les siens,
- Militaire, en appuyant les Touareg contre les groupes islamiques qui, à l’époque, totalisaient moins de 300 combattants qui avaient commis l’erreur de sortir de la clandestinité désertique pour se rassembler à Gao et à Tombouctou.
Au lieu de cela, dans la plus totale indécision doublée d’un manque absolu de vision géostratégique, la France :
- S’est réfugiée à l’abri du principe de l’intangibilité des frontières,
- A cédé devant les exigences algériennes de non intervention,
- A camouflé sa pusillanimité derrière l’argument d’une « action » de la CEDEAO, ce «machin », ce «volapuk », cette tour de Babel, dont l’efficacité militaire relève de la méthode Coué,
- A laissé les islamistes liquider militairement les Touareg.
Le résultat de cette addition de démissions décisionnelles est qu’un incendie limité pouvant être rapidement éteint, notamment au moyen d’une de ces opérations « discrètes » que nos forces savent encore si bien mener, est aujourd’hui devenu un foyer régional de déstabilisation. En effet :
1) Le Mnla ayant été militairement défait et repoussé vers la frontière algérienne, les islamistes qui ne risquent plus d’être pris à revers sur leur flanc nord ont désormais toute la profondeur saharienne pour manoeuvrer. Quant à leur flanc ouest, il semble également s’ouvrir car au sein des tribus arabes de Mauritanie, certains, de plus en plus nombreux, commencent à se poser des questions…
2) Sur le flanc oriental la situation leur devient également de plus en plus favorable car le chaos en retour se fait sentir en Libye où tout le sud du pays est mûr pour devenir un nouveau Mali. Quant au sud de la Tunisie, la contamination y a largement commencé.
3) La contagion n’est plus qu’une question de temps au Tchad et au Darfour cependant qu’un continuum fondamentaliste est en passe de s’établir avec les islamistes de Boko Haram du nord Nigeria
Ainsi donc, le « Sahélistan », fantasme il y a encore quelques mois, devient-il peu à peu réalité. L’une de ses forces est qu’il s’agit d’une résurgence historique ramenant directement aux jihad sahéliens du XIX° siècle qui enflammèrent la totalité de la région depuis le Soudan à l’Est jusqu’au Sénégal à l’Ouest. Or, l’islamisme sahélien de 2012 s’abreuve à cette « fontaine de rêve » fermée par la colonisation. Comment cette réalité inscrite dans la longue durée peut-elle être comprise par des journalistes ou des politiciens esclaves de l’immédiateté et de leur inculture ? Comment pourrait-elle l’être par ces «africanistes » élyséens dont la principale activité semble être de torpiller les informations que les militaires font « remonter » depuis le terrain ?
Dans le Sahel, au coeur de ce qui fut notre « pré carré », ceux qui inspirent la politique de la France ont donc laissé s’écrire le même scénario que celui que nous avons connu dans la région des Grands Lacs et qui peut être exposé en quatre points :
1) Une erreur d’analyse reposant sur la priorité donnée aux postulats idéologiques aux dépens des réalités géographiques, anthropologiques et historiques.
2) L’absence de toute véritable stratégie de défense.
3) Le tropisme de l’abandon de nos alliés ou amis.
4) La place laissée libre à des acteurs extérieurs. Dans le cas présent, l’Algérie et les Etats-Unis qui attendent le moment propice pour intervenir, mais à leur manière. Les conséquences de l’incompétence hexagonale seront alors camouflées sous l’alibi facile de «complot anglo-saxon » contre les intérêts français...
Alors que tout ce qui se passe dans la zone concernée nous est connu, alors que nous savons tout, et au-delà, de ceux qui la déstabilisent, alors que nous y disposons de tous les réseaux utiles, alors enfin que, parfaitement immergées, nos forces auraient pu rapidement « régler » le problème, l’Elysée a laissé la situation lui échapper.
Faut-il s’en étonner quand la tête de l’Etat dodeline entre indécision et repentance ? »
Bernard Lugan 23/11/12.
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16/11/2012
J'y vais ou j'y vais pas: au Mali?
La décision d’intervenir au Mali pour éradiquer le terrorisme du nord du pays, n’est pas facile à prendre. En y allant nous risquons la vie des six otages français, détenus par les islamistes, si nous n’y allons pas nous perdons notre crédibilité auprès des pays d‘Afrique où nous avons encore influence et intérêts.
Une force constituée de détachements de la CEDEAO entrainée par nos soins sera certainement capable de reconquérir les villes, Tombouctou, Gao… mais les bandes gangstero-islamistes se disperseront dans le désert, où seul l’appui des Touaregs permettrait de les poursuivre. Comme l’explique Bernard Lugan dans son blog, cet appui ne pourra être acquis que moyennant un changement politique du Mali leur assurant une large autonomie :
« Dans sa conférence de presse du mardi 13 novembre, François Hollande a marché sur des œufs quand il a parlé de la question du Mali. Il sait en effet très bien que si nous intervenons, nos malheureux otages seront assassinés mais que, si nous n’intervenons pas, nous perdrons le peu d’influence qui nous reste encore sur le continent...
Face à ce dilemme, son choix peut ainsi être résumé: nous n’intervenons pas mais nous allons former ceux qui vont intervenir…en espérant que cette argutie permettra d’éviter de froisser les Algériens qui ne veulent pas entendre parler d’une action française...
Or, ce que le président de la République ne semble pas avoir compris c’est qu’une opération militaire ne se construit pas comme une synthèse entre divers courants, à l’image de ce qui se fait lors des congrès du parti socialiste. En la matière, alors qu’il faut des objectifs clairs et des moyens adaptés, nous sommes au contraire dans le flou. En effet:
1) Si l’expédition de la CEDEAO a pour seul but d’en revenir à la situation antérieure, c'est-à-dire permettre au sud Mali de continuer à coloniser le nord Mali, rien ne sera réglé. Une intervention qui ne serait pas précédée du règlement politique de la question touareg ne ferait en effet que reporter le problème tout en l’amplifiant. Or, rien n’a été décidé quant à la nécessaire réorganisation administrative du Mali après la reconquête de ses villes du nord car les responsables français ont été incapables d’imposer à Bamako un véritable fédéralisme ou mieux, un confédéralisme, en échange de l’intervention militaire.
2) Sans un étroit « coaching » français, la force de la CEDEAO qui va se lancer à la « reconquête » du nord Mali sera militairement incapable de mener l’opération à son terme, c'est-à-dire jusqu’à l’éradication des groupes gangstéro-islamistes qui occupent la région.
Entendons-nous bien : reprendre Tombouctou et Gao ne posera aucun problème à ce mini corps expéditionnaire ; d’autant plus que les terroristes refuseront un choc frontal et se replieront dès le début de l’offensive pour se diluer dans le désert. Comme leur poursuite n’est pas à la portée des troupes de la CEDEAO, le problème aura simplement été déplacé ; notamment vers le Nord, et c’est très précisément ce que ne veut pas l’Algérie.
Pour que l’expédition qui se prépare soit une réussite, pour éviter que les groupes terroristes contaminent tout le Sahara et toute la bande sahélienne, il est donc impératif de les fixer afin de pouvoir les éliminer. C’est pourquoi les forces françaises doivent être directement engagées. Sans compter que, même pour la reprise des villes du Nord, leur présence effective est une nécessité, ne serait-ce que pour donner un minimum de cohésion à des forces disparates, pour éventuellement être en mesure de les « engerber » et de leur fournir une colonne vertébrale.
Le président de la République ayant clairement déclaré lors de sa conférence de presse que tout cela était hors de question, il est donc d’ores et déjà possible d’annoncer que la question du terrorisme sahélien fera encore l’actualité dans les prochaines années. (Bernard Lugan 14/11/12)
Reste l’hypothèse d’une action conjointe avec l’Algérie qui serait certainement ce qu’il y aurait de plus efficace mais nécessite une modification radicale de nos rapports avec ce pays. On peut quand même rêver. Le temps de la réconciliation est peut être arrivé ?
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