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27/10/2012

Honni soit qui Mali pense

Il faut, paraît-il, renoncer à la Françafrique, peut être, mais il n’empêche que nous avons encore en Afrique de nombreux intérêts qui, pour être les séquelles de la colonisation, n’en existent pas moins. Faut il les abandonner ?

De nombreux pays d’Afrique qui hantent avec constance les sommets de la Francophonie comptent encore sur nous pour maintenir et quelquefois rétablir l’ordre dans un continent traversé par des conflits en tous genres, religieux, tribaux, économiques, voire politiques, souvent hérités d’un partage entre les puissances coloniales sur lequel les Africains ne pouvaient mais.

C’est le cas au Mali où des frontières regroupent entre le nord et le sud des populations de race et de culture différentes. Les Touaregs du nord, toujours méprisés par les populations sédentaires du sud, de retour de Libye où ils servaient Kadhafi, avec leurs armes, ont déclenché un combat pour leur indépendance, celle de l’Azawad, et reconduit vite-fait l’armée malienne au sud du fleuve Niger.

Seulement leur mouvement a été détourné par des groupes islamistes AQMI et le Mujao déjà présents mais qui maintenant ont récupéré les armes venues de Libye.

Encore une conséquence de notre malencontreuse intervention en Libye.

Et maintenant les islamistes ont pris le pouvoir au nord Mali et y imposent la charia : exécutant, coupant des mains, fouettant, détruisant les mausolées de Tombouctou.

Les hommes et les femmes n’y ont pas le droit de se promener ensemble, le voile est obligatoire, la musique est interdite et on ne reçoit plus la télé.

Tombouctou est redevenue, sous la férule des islamistes, presque aussi fermée qu'il y a deux siècles, au temps de René Caillié.

Mais ces groupes qui regroupent quelques milliers de combattants bien armés, sont riches et puissants alliant islamisme et gangstérisme, vivant du trafic de drogue, de la contrebande, du proxénétisme et des enlèvements contre rançon, ils détiennent depuis deux ans six Français qu’ils menacent d’exécuter.

La communauté mondiale peut elle laisser faire au risque de voir s’établir et s’étendre à tout le Sahel une zone grise ou règneront islamisme et banditisme ?

A l’initiative de la France, le Conseil de sécurité de l’ONU a voté à l’unanimité le 12 octobre une résolution autorisant la préparation de l’ intervention d’une force militaire internationale en appui de l’armée malienne.

Officiellement c’est la CEDEAO (la Communauté économique des Etats d’Afrique occidentale) qui doit la fournir. Mais également l’Union européenne et l’Union africaine sont priées « de prêter, dès que possible et de manière coordonnée, aux forces armées et aux forces de sécurité maliennes leur concours et leur savoir-faire, ainsi que leur appui en matière de formation et de renforcement des capacités ».

Autrement dit on compte sur la CEDEAO pour fournir les troupes, on espère quelque trois mille hommes, mais actuellement les états de cette communauté sont pour certains comme le Nigeria pris par leurs problèmes internes ou ne possèdent pas les moyens nécessaires.

Bien entendu la France et d’autres pays notamment européens, pourraient fournir la logistique indispensable et les actions de formation pour arriver à une armée crédible mais ce n’est pas assuré, l’environnement désertique au nord Mali est difficile.

Il n’est guère possible à la France sous peine de se faire taxer de néocolonialisme, d’intervenir massivement au sol d’autant qu’AQMI détient six otages. Tout au plus pourrait elle faire intervenir ses forces spéciales, équiper et entrainer l’armée malienne en pleine déliquescence et les forces fournies par la CEDEAO, puis pendant l’intervention assurer renseignements, transmissions, transports, et éventuellement un appui aérien.

Mais la vraie solution est à Alger ; l’Algérie était bien décidée à ne pas intervenir tant que le conflit ne débordait pas chez elle, mais elle a été la cible du Mujao qui a commis des attentats contre des casernes et est surtout à l’origine de l’enlèvement de sept diplomates à Gao.

Peut être serait il temps pour la France et l’Algérie, plutôt que de se complaire dans des conflits mémoriels qui commencent à dater, d’enterrer la hache de guerre et de se décider à une coopération réelle, économique et politique, dans leur zone commune d’intérêt et d’influence.

L’Algérie est la seule puissance locale ayant les moyens d’intervenir efficacement, une action conjointe du Mali, de la France et de l’Algérie devrait pouvoir régler le problème au bénéfice de tous.

 

http://dejudasatartuffelettresaumonde.hautetfort.com

 

 

04/07/2012

Les Islamistes au Sahel

Il semble que la France obnubilée par la Syrie et sa volonté de voir al-Assad renversé, ne se préoccupe guère de la déstabilisation du Sahel et en particulier du Mali. Pourtant nous sommes historiquement impliqués dans cette zone où nous avons encore des intérêts.

Ca a commencé en janvier 2012, quand les Touaregs, retour de Libye où ils servaient Kadhafi, reviennent avec leurs armes et fondent le MNLA, mouvement national de libération de l’Azawad, la nation Touareg, culbutent l’armée malienne puis proclament l’indépendance de l’Azawad. C’est en fait une sécession du nord Mali, au nord du fleuve Niger.

Les islamistes d’Al Qaida et de ses diverticules régionaux se joignent au mouvement avec l’idée de créer un califat transnational. Ils sont aidés par un dissident touareg qui fonde le mouvement Ansar Dine constitué au départ par une fraction touareg ifora à laquelle se joignent des combattants islamistes arabes ou sahéliens. Ceux ci après s’être renforcés, chassent les Touaregs de la région du fleuve Niger. Les touaregs quittent Ansar Dine pour rejoindre le MNLA.  Ansar Dine n’est donc plus un mouvement touareg, mais une milice islamiste.

Les Islamistes ont maintenant pris possession de Gao et de Tombouctou où ils imposent l’ordre islamique. Ils ne sont pas très nombreux, entre 300 et 500 mais puissamment armés et ils détiennent des otages européens et algériens.

Le MNLA a perdu son avantage des débuts, celui des stocks d'armes, ramenées de Libye au moment de la chute de leur employeur Mouammar Kadhafi. Hama Ag Sid'Hamed, porte-parole du conseil transitoire du MNLA, le reconnaît : « Nos hommes ont vendu leurs armes et leurs munitions au Mujao  (Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest, autre groupe armé actif au nord du Mali). On leur disait : ne vendez pas, vous vous faites désarmer et, pire encore, ces armes seront bientôt retournées contre vous, comment expliquer ça à des gens qui n'ont rien. »

Le MNLA est à court de moyens financiers, contrairement aux mouvements islamistes dont les caisses ont été alimentées par les prises d'otages mais aussi par les trafics aux mains d'une « mafia » que n'effraient pas les relations avec les djihadistes.

La destruction systématique de mausolées à Tombouctou, qui indigne l’opinion publique, correspond à une vision fondamentaliste de l’Islam, assimilant le culte des saints locaux qui y sont enterrés à de l’idolâtrie. Le salafisme ne s'accommode pas des pratiques de l'islam de rite malékite en vigueur à Tombouctou.

Si nous ne faisons rien, il va se développer un califat fondamentaliste en zone sahélienne, débordant du Mali. Il faudrait aider les Touaregs dans leur combat contre les islamistes. Il faut aussi convaincre Bamako que le Mali unitaire a vécu et faire revenir les Touaregs sur leur déclaration unilatérale d’indépendance en échange d’une très forte décentralisation.

Mais il faudrait que les responsables politiques européens abandonnent des idées obsolètes comme celle de l’intangibilité des frontières issues de la colonisation déjà mise à mal en Somalie, au Soudan et même aux Comores.

Sinon nous risquons de voir intervenir l’Algérie, qui se sent menacée à sa frontière sud, Alger négocie avec tous, y compris avec le Mujao qui détient, depuis le 5 avril, le consul d'Algérie et six de ses collaborateurs, enlevés à Gao.

Or, si Alger, seule puissance régionale militaire, qui avait parrainé les accords entre les rebelles touaregs et le pouvoir central de Bamako en 2006, maintient coûte que coûte sa ligne pour une "solution politique négociée" et réfute toute idée d'intervention, des généraux militent désormais en coulisses pour une option militaire

NB Cette note est basée sur l’analyse de Bernard Lugan dans l’Afrique Réelle.

 

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