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26/01/2012

Qui défendra les Chrétiens ?

Qui défendra les Chrétiens ?

 

Le nouveau parlement égyptien comprend 235 députés issus des Frères Musulmans et 124 Salafistes. Combien de Coptes qui représentent 10% de la population ? personne n’en parle. Le précédent parlement comportait 10 députés Coptes dont 7 choisis par le général Moubarak. Les Salafistes militent pour l’application progressive de la charia, que vont devenir les Coptes ?

Monseigneur Jeanbart, archevêque catholique d’Alep s’inquiète du départ de Bachar el Assad redoutant l’arrivée des islamistes au pouvoir alors qu’ils ne représentent que 15% des Syriens ; il est persuadé qu’un renversement du régime pousserait les chrétiens à émigrer comme en Irak après la chute de Saddam Hussein. Il souhaite une évolution du régime pas son renversement et ne comprend pas la position française : « Pourquoi être aussi en pointe contre la Syrie? On n'aurait jamais imaginé cela de la France, en particulier nous autres les chrétiens. »

Au Nigeria, dans la région de Kano, Boko Haram, mouvement islamiste lié à Al Quaida, est à l’origine du massacre de plusieurs centaines de personnes. Au début on signalait que les victimes étaient des chrétiens, maintenant on ne dit plus rien préférant cacher cet aspect des choses. Personne ne défend les chrétiens du nord du Nigéria.

Où est l’époque pas si lointaine où le France se considérait comme protectrice des chrétiens d’Orient ?

19/01/2012

Mururoa : le coût écologique des essais nucléaires.

 

Mururoa : le coût écologique des essais nucléaires.

 

Je ne pense pas que votre reporter (Le Monde du 18 janvier 2012) se soit rendue à Mururoa, sinon elle est d’une certaine mauvaise foi. C’est vrai qu’il y a ici et là des installations en béton, mais l’ensemble de l’atoll n’est guère ravagé et on s’est toujours baigné dans le lagon.

Il n’empêche que Mururoa est devenu un dépôt nucléaire de fait et il devra rester définitivement inhabité et surveillé.

Cela ne changera pas grand’ chose, Mururoa et Fangataufa n’ont jamais été habités. Aussi il faut bien admettre que votre citation :"Chez nous aux Tuamotu, l'île est notre mère nourricière et aujourd'hui elle est morte" est apocryphe ou inadaptée.

Le retour des atolls au Territoire a toujours été prévu et la convention de cession prévoyait : "au cas de cessation des activités du Centre d'expérimentations du Pacifique, les atolls de Mururoa et de Fangataufa feront d'office retour gratuit au domaine du territoire dans l'état où ils se trouveront à cette époque, sans dédommagement ni réparation d'aucune sorte de la part de l'État".

Si on devait suivre à la lettre ces dispositions la situation serait parfaitement claire : à partir du moment où l'État français n'a plus besoin des deux atolls, il les redonne au Territoire, dans l'état où ils se trouvent, à charge pour les autorités de la Polynésie française de régler tous les problèmes qui pourraient survenir.

Ce n’est pas du tout ce qui se passe:

Le Gouvernement français a décidé de passer avec la Polynésie une convention pour le renforcement de l'autonomie économique, destinée en fait à atténuer le choc économique qu'ont produit l'arrêt définitif des essais nucléaires et la fermeture du CEP. Pour ne pas trop pénaliser l'économie du territoire, l'État s'est ainsi engagé à verser chaque année jusqu'en 2006 une enveloppe de 990 millions de francs, cette allocation a depuis été pérennisée.

Donc quand le sénateur Richard Tuhieava declare: “La restitution est une manière d'apaiser les blessures psychologiques" causées par la période nucléaire, il exagère un peu: l’ère du Centre d’Essais du Pacifique a été un age d’or pour la Polynésie et a permis un développement rapide et l’enrichissement de la population.

De plus la France assure la surveillance radiologique de l’atoll et des eaux environnantes.

Jusqu’à maintenant l’accroissement de la radioactivité naturelle de l’océan par la radioactivité artificielle a toujours été très faible et parfaitement négligeable à Tureia, l’atoll le plus proche.

Le glissement de terrain envisagé ne concerne que l’anneau corallien et non le basalte où les tirs ont été effectués et n’entrainerait aucune matière radioactive dans l’océan.

Seulement, la Polynésie souffre d’une instabilité politique chronique et de constants changements de présidents. Mr Tong Sang a été remplacé depuis pas mal de temps par Mr Témaru qui se dit indépendantiste. Les finances de la Polynésie sont dans un triste état.

Votre évocation de Hao où il n’y a jamais eu la moindre activité nucléaire et où la population est restée sur place est parfaitement ridicule. La dépollution doit concerner le démantèlement de la base aérienne, il ne faut pas tout mélanger.

Quoiqu’il en soit il est vrai que Mururoa constitue un dépôt de matières radioactives de fait et le restera. Il y a longtemps que je milite pour que cet atoll isolé dans un désert océanique soit utilisé comme site d’enfouissement des déchets nucléaires Haute Activité provenant de l’usine de la Hague plutôt que de créer à Bure dans la Meuse un site dans une zone de forte densité de population pour un coût astronomique, on parle de 35 milliards d’euros, le prix de 6 réacteurs EPR.

Ce serait une ressource importante et pérenne pour la Polynésie. Mais jusqu’à maintenant je prêche dans le désert.

14/01/2012

Désinformation et intoxication

« Irréfutable » titre Libération du 11 janvier, « Génocide rwandais : le camp Kagame innocenté » titre Le Monde du 12 janvier, la presse bien pensante n’a pas été longue à tirer des conclusions bien hâtives des déclarations du juge Trévidic et ce dans le but d’impliquer l’armée française.

Le juge Trévidic en charge du dossier de l’attentat ayant abattu le Falcon 50 du président rwandais le 6 avril 1994, s’était rendu sur les lieux avec des experts pour, seulement, tenter de déterminer l’emplacement d’où les missiles avaient été tirés.

Son rapport qui n’a pas été diffusé privilégie Kanombé où se situe un camp militaire de l’armée rwandaise.

Rien d’affirmatif donc de simples hypothèses basées sur deux témoignages datant de 18 ans.
Un témoin ayant entendu les départs, très bruyants, des missiles l’autre ayant suivi de loin le missile ayant abattu l’avion et l’impact.

Seulement les journalistes ont été écouter uniquement Mtre Bernard Maingain défenseur des sept Rwandais tutsis inculpés par le juge Bruguière après de nombreux témoignages et concluent que Kagame, actuel président rwandais, et les tutsis ne sont pour rien dans l’affaire et que ce sont des extrémistes hutus qui sont à l’origine du génocide.

En fait le document ne permet aucune extrapolation car il ne dit pas qui a, ou qui n’a pas, abattu l’avion présidentiel.

Le 6 avril 1994 vers 20h 30, alors qu’il allait atterrir à Kigali, l’avion du président hutu Juvénal Habyarimana a été abattu par deux missiles portables SAM 16 or, comme cela a été établi devant le TPIR, l’armée rwandaise ne disposait pas de tels missiles ni de tireurs formés.

L’origine de ces engins a été reconstituée : fabriqués en URSS, ils faisaient  partie d’un lot de 40 missiles SA 16 IGLA livrés à l’armée ougandaise quelques années auparavant. Pour mémoire, Paul Kagamé et ses principaux adjoints étaient officiers supérieurs dans l’armée ougandaise avant la guerre civile rwandaise.

Trouvèrent la mort deux chefs d’Etat en exercice, les présidents Juvénal Habyarimana du Rwanda et Cyprien Ntaryamira du Burundi,et le chef d’état-major des FAR (Forces armées rwandaises), le général Deogratias Nsabimana, ainsi que quatre autorités rwandaises et les trois membres français de l’équipage.

Depuis cet attentat, deux thèses s’opposent :

1)     Celle de l’attentat commis par des « extrémistes hutu » qui auraient assassiné leur propre président ainsi que leurs propres partisans qui étaient à bord de l’avion afin de pouvoir déclencher un génocide qu’ils avaient programmé et préparé.

2)     Celle d’un attentat commis par le FPR sur ordre du général Kagamé afin de décapiter l’Etat rwandais et disposer d’un prétexte pour prendre militairement le pouvoir.

Le juge Bruguière qui ne s’est pas rendu au Rwanda a rendu une ordonnance (novembre 2006) dans laquelle il accuse le président Kagamé d’avoir ordonné l’attentat qui coûta la vie à son prédécesseur. Il lança alors des mandats d’arrêt contre sept tutsis dont Kagame.

Le juge Bruguière se fondait notamment, mais pas exclusivement, sur les déclarations et témoignages de plusieurs transfuges tutsis qui lui donnèrent force détails sur l’opération, dont les noms des membres du commando ayant abattu l’avion. L’un d’entre eux, Abdul-Joshua Ruzibiza, répéta ses accusations, sous serment cette fois, devant le TPIR et les procès verbaux des audiences concernées sont très clairs à ce sujet.

Le document remis aux parties par le juge Trévidic le 10 janvier remet-il en question cet exposé du dossier ?

Non, car la seule nouveauté qu’il contient concerne le lieu du tir des deux missiles. Selon le rapport d’expertise, ce lieu se situerait « probablement » dans le camp militaire de Kanombe, soit à une distance d’à peine deux à trois kilomètres de la ferme de Masaka identifiée comme point de tir par le juge Bruguière. De plus, et il est important de le préciser, cette « probabilité » n’est pas apparue aux experts balistiques à la suite d’une démonstration, mais par élimination et en raison des arguments de l’expert acoustique, ce qui devra être étayé lors de la contre-expertise.

Le juge Trévidic va maintenant devoir confronter ce rapport d’expertise aux autres éléments du dossier.

Ils va ainsi devoir résoudre la question des étuis des deux missiles trouvés à Masaka, la question étant de savoir s’ils y ont été abandonnés par les tireurs de l’APR, ce qui ramènerait l’accusation dans le camp de Paul Kagamé, ou si, après avoir abattu leur propre président, leur propre chef d’état-major et leurs propres amis, les « extrémistes » hutu les y auraient déposés afin de faire croire à la responsabilité de l’APR/FPR.

Ils vont également devoir comparer le rapport d’expertise et ses « probabilités » à ceux des témoignages contenus dans le dossier et qui donnent avec une grande précision et une impressionnante quantité de détails le lieu du tir, à savoir Masaka, ainsi que les noms des deux tireurs et des membres de leur escorte, la marque et la couleur des véhicules utilisés pour transporter les missiles depuis l’Ouganda jusqu’au casernement de l’APR situé au centre de Kigali et de là jusqu’au lieu de tir à travers les lignes de l’armée rwandaise, ainsi que le déroulé minuté de l’action.

L’amusant dans cette affaire est de voir ces journaux de gauche se porter au secours d’un autocrate, ayant pris le pouvoir à la suite des massacres et qui gouverne le Rwanda d’une main plus que ferme.

 

NB   Cet article est largement repris de « l’Afrique Réelle » de Bernard Lugan à laquelle je collabore.

www.bernard-lugan.com

08/01/2012

La départementalisation de Mayotte et ses conséquences

 

La départementalisation de Mayotte et ses conséquences.

   

Sans vouloir jouer les Cassandre on peut dire que l’Afrique Réelle avait prédit que la départementalisation de Mayotte le 1er avril 2011, conduirait à des malentendus et à des discordes. C’était bien prévisible étant donné l’écart entre l’ « île aux parfums », qui d’ailleurs n’en produit plus, entièrement islamisée et non francophone et ce que nous connaissons, encore, en Métropole.

Pendant un mois et demi Mayotte a été le lieu d’affrontements atteignant l’émeute, sous couleur de lutter contre la vie chère mais en fait ayant sous jacentes, de profondes désillusions, conséquences du poker menteur auquel se sont livrés aussi bien les élus mahorais que les dirigeants et les élus métropolitains.

La demande de départementalisation remonte à 1973, soutenue particulièrement par Marcel Henry, un créole mahorais, qui voulait aussi le maintien du mode de vie mahorais régi par la loi musulmane.

Il y avait alors 40 000 Mahorais, menant une vie très tranquille dans une île où, il faut bien le dire, la France dont elle relevait depuis 130 ans n’avait rien fait, comme dans le reste de l’archipel d’ailleurs. Il n’y avait pas de routes, pas d’hôpitaux, pas d’écoles, hormis les écoles coraniques, pas d’administration - c’était les cadis qui s’occupaient de l’état civil et de la justice suivant le droit coranique - l’Islam réglait la vie mahoraise.

L’affaire sembla mineure au départ et plutôt sympathique, si bien que lors du referendum des Comores sur l’indépendance en 1974, la France sépara Mayotte du reste de l’archipel qui avait voté pour l’indépendance, Mayotte votant à 64% pour le maintien dans l’ensemble français.

Conscient quand même du problème, la France lui accorda un statut de « collectivité territoriale de la République », n’envisageant pas la départementalisation.

Puis l’île se développa rapidement, la France construisant écoles, routes, hôpitaux, centrale électrique. Sous l’impulsion d’une forte démographie, les femmes, souvent polygames, ayant généralement 5 ou 6 enfants, de l’amélioration de la situation sanitaire et de l’immigration venant des autres îles, la population se mit à croitre au rythme de quelque 5% par an pour atteindre de nos jours 200 000 habitants, soit une densité de 500 au km2 , et cette croissance se poursuit,  54 % delà population a moins de 20 ans.

Le revenu par habitant reste faible mais dix fois supérieur à celui des autres Comores, d’où une immigration incontrôlable  d’autant qu’il existe de nombreux liens familiaux entre les îles de l’archipel.

Et c’est là que commencent les malentendus.

D’abord les élus mahorais veulent faire croire à un attachement indéfectible à la France, alors qu’en fait Mayotte fuyait le reste de l’archipel se souvenant des exactions que les Mahorais subissaient de la part des autres Comoriens avant la prise de possession française et que d’autre part les Mahorais voyaient avec envie la richesse réunionnaise, fruit d’une manne métropolitaine dont ils voudraient bien aussi profiter.

Pendant 30 ans la France multiplie les manœuvres dilatoires, referendum, changements de statuts, avec l’idée de noyer le poisson repoussant aux calendes grecques une départementalisation dont on se rend compte qu’elle serait lourde de conséquences dommageables.

Malencontreusement le dernier statut s’appelle « communauté départementale » bien que l’île reste une Communauté d’Outremer.                                                                                                                                      Arrivent les élections présidentielles de 2007 - Mayotte c’est 70 000 électeurs -, le candidat Sarkozy promet la départementalisation de Mayotte s’il est élu.

La départementalisation

Et cette promesse électorale sera tenue. Seulement nos dirigeants qui font semblant de croire que les Mahorais vont devenir d’excellents Gaulois, sont conscients qu’un referendum auprès des Français risque ne pas passer : les Français vont découvrir cette île dont la plupart ignorent l’existence, vont apprendre qu’elle est musulmane à 95%, qu’on y parle surtout shimahore, un dialecte proche du swahili, qu’on y est polygame et qu’on y vit selon la charia, et qu’en fait Mayotte n’a rien de français : il y a toute chance pour que le non l’emporte. Alors on va largement interpréter la Constitution qui prévoit pour une adjonction de territoire « le consentement des populations intéressées » et admettre que les Français ne le sont pas, ce qui est faux à l’évidence. En France on se contente de rajouter un article dans une loi concernant la Nouvelle Calédonie et de voter à l’unanimité des deux assemblées deux lois organisant le département de Mayotte.                                                                                       Par contre en 2009 on organise un referendum à Mayotte qui recueille 92% de oui.

Mais ce que les élus mahorais qui sont montés à Paris pour signer le « Pacte pour la départementalisation de Mayotte », une sorte de contrat entre Mayotte et l'état français, se sont bien gardés de dire à leurs électeurs c’est que ce rattachement sera progressif, étalé sur 20 à 25 ans, qu’ils vont dépendre du droit français, payer des impôts, que les terres qu’ils occupent depuis des décennies ne leur appartiennent pas et qu’il va falloir les racheter quand le cadastre sera établi. La manne attendue sera au départ fort limitée, le RSA ne sera versé pendant 5 ans qu’à 25% et le rattachement à l’Europe n’est pas assuré.

C’est de là que proviennent le malaise et l’incompréhension qui conduiront aux troubles actuels.

 Une société déstabilisée

Depuis la sécession de Mayotte en 1975, la population est passée de 40 000 à 200 000 habitants, dont 60 000 clandestins. Il n’y avait que l’école coranique, maintenant on scolarise l’ensemble des enfants. On a dépensé en 2010, 262 millions d’euros pour instruire 81 500 élèves, nombre qui ne cesse d’augmenter pour un résultat, il faut le dire, médiocre, les enfants parlant peu le français au départ. L’éducation nationale emploie 5 500 agents, les enseignants des collèges et lycées étant  pour la plupart venus de métropole. C’est un effort considérable mais on comprendra que s’il n’y a pas de débouchés, on forme des aigris. Or 5 000 jeunes arrivent tous les ans sur le marché du travail pour 2 000 emplois.Il y a 33 000 emplois salariés pour 200 000 habitants, et un chômage considérable :près de 18% et plus de 30% chez les jeunes de moins de 25 ans.                                                    Mais on dit aux Mahorais qu’ils sont des Français comme les autres et quand ils regardent la télévision - ils reçoivent les programmes de métropole - ils voient bien que ce n’est pas vrai.                                                        Le PIB par tête y est de 6600 euros, contre 17 000 à la Réunion. Mais il est supérieur à ceux de Maurice et de l’Afrique du Sud

 Ils ont changé de mode de vie, on leur a créé de toutes pièces un état civil et ils ont du changer de noms, ce n’est d’ailleurs pas fini au bout de dix ans, leurs problèmes sont maintenant réglés par le juge et le notaire et plus par le cadi.

La réforme du foncier s'avère nettement plus risquée. Comment faire comprendre à quelqu'un qui occupe un terrain en bord de mer depuis des décennies, voire des générations, que ce terrain ne lui appartient plus, mais fait partie du domaine de l'Etat ?                                                                                                                                       La société mahoraise a changé : d’une société communautaire, on est entré dans une société individualiste.On a isolé Mayotte des autres Comores, mais la plupart des Mahorais ont dans les autres iles des parents voire des épouses. Maintenant il faut un visa pour venir à Mayotte ou payer un passeur pour venir clandestinement à bord d’un kwassa kwassa au risque de se noyer - entre 100 et 150 victimes chaque année - puis d’être expulsé sans ménagement, 26 000 par an.D’ailleurs depuis peu, le tribunal administratif condamne régulièrement la préfecture, pour des expulsions illégales.                                                                                                                                    Les habitudes alimentaires ont changé, les Mahorais ne se nourrissent plus de sorgho et de bananes, et les produits de première nécessité sont maintenant, les poulets, le riz, le lait, les tomates, la viande et les bouteilles de gaz. Et on peut s’étonner d’entendre un Mahorais déclarer : « on en a marre de payer une portion de brie 7 euros ! » mais maintenant c’est ça.

Il y a 20 000 métropolitains blancs, enseignants, cadres, fonctionnaires, gendarmes ; ils gagnent bien leur vie, du coup les Mahorais estiment vivre sous un régime colonial et au cours des manifestations s’est révélé un violent racisme anti blancs au point que certains sont rentrés en métropole ou à la Réunion ; 25 professeurs, généralement victimes de caillassage ou d’agressions directes, ont choisi de rompre leur contrat immédiatement.

Une économie sous perfusion

Et Mayotte ne produit plus rien d’exportable, la production de ylang ylang est devenue quasi nulle, celle de vanille a disparu à cause du cout de la main d’oeuvre. La pisciculture périclite, le tourisme ne se développe pas faute d’infrastructures, de personnel formé et des coûts élevés : une chambre d’hôtel se paye 120€ la nuit, comment concurrencer Maurice ? D’autant que la délinquance ne fait que croitre, des touristes se font agresser et dépouiller. La crise a fait perdre 1,5 million d’euros.                                                                                                                   Les seules activités sont le bâtiment, les travaux publics et le commerce pour le plus gros aux mains de métropolitains et de Réunionnais. Les Mahorais préfèrent investir dans la construction de logements que créer des entreprises, le secteur public représente 49% du PIB local. Le Conseil Général et les communes gérés par des Mahorais ont recruté quantité d’agents par clientélisme ou raisons sociales. Incompétence, gabegie, népotisme, la plupart des collectivités locales sont en cessation de payement ou sous tutelle. Le budget du Conseil Général est en déficit de 65 millions d’euros.

Sur 200 000 seuls 30 000 Mahorais travaillent, 44% de la population en âge de travailler est inactive, et seuls 4 "revenus sociaux" sur 22 sont en place, avec le RSA prévu à 25 % seulement à partir du 1er janvier 2012. Un salaire fait vivre six personnes et le SMIC est à 85% du niveau national. Aujourd'hui le Mahorais ne consomme pratiquement que des produits importés. Avant il y avait les coopératives agricoles maintenant on doit se rendre dans les grandes surfaces.

L’agriculture mahoraise n’est absolument pas développée, la moyenne des exploitations est de 0,45 ha, elle n’occupe que le tiers des 20 700 ha exploitables. 92 % des surfaces cultivées sont occupées par des cultures vivrières surtout à usage familial, on compte seulement 17 000 bovins, 12 600 caprins et ovins, et les poulets sont élevés de manière traditionnelle pour les besoins de la famille. Il faudrait créer une agriculture moderne, des serres pour les tomates et les légumes, des élevages de poulets. Qui le fera au prix de la main d’oeuvre ?

Bien sur la vie est chère, bien plus chère qu’en métropole d’où tout vient ou transite. La viande surgelée et les mabawas congelés (ailes de poulets) viennent du Brésil ou d’Afrique du Sud.                                                        On n’importe pas de viande de Madagascar où elle ne coute presque rien faute d’un abattoir et d’une filière de contrôle phytosanitaire aux normes européennes.                                                                                                        En fait toute l’économie repose sur les transferts de la métropole, subventions et salaires des fonctionnaires. Le cout de Mayotte en année pleine, est estimé à un milliard d’euros par an.

Manifestations contre la vie chère.

Pendant près de deux mois les Mahorais ont manifesté contre la vie chère : grève générale prolongée, barrage des routes, manifestations violentes avec caillassage des forces de l’ordre, même de la voiture du préfet, blocage et pillage des commerces, la vie économique a été interrompue pendant un mois et demi, 50 entreprises sont touchées et 2300 emplois sont en péril et il y a eu un mort parmi les manifestants.                                                  La vie est chère à Mayotte, où tout est importé et qui constitue un micromarché où les frais de transport et de commercialisation sont élevés, mais la cause profonde du conflit s’appelle « frustration » : frustration devant une départementalisation qui ne répond pas à l’attente des Mahorais, à leur rêve en fait après des dizaines d’années d’espérance. Ils pensaient vivre du jour au lendemain comme les Français de la métropole et ce n’est pas du tout ce qui se produit. Ils vivent mieux, bien sur, que dans le reste de l’archipel mais beaucoup moins bien qu’à la Réunion et ils découvrent soudain qu’il faudra 25 ans pour la rejoindre. En plus on leur demande de changer de mode de vie, de faire des études pour lesquelles il n’y a pas de débouchés. Ils constatent que tous les emplois de responsabilité sont tenus par les Mzungus (les blancs) et crient au régime colonial. On aura constaté que c’était surtout les jeunes même les enfants qui manifestaient.

En plus derrière la « vie chère » se cachent de nombreux non-dits, en particulier les revendications d’ « indexation » des salaires des fonctionnaires et surtout des instituteurs, sur le cout de la vie dont bénéficient déjà les gendarmes et les militaires, et l’intégration dans les corps de la fonction publique, et les visées électorales de certains syndicalistes. Cette manifestation a été un révélateur, des espoirs déçus – bien sur ils étaient insensés -, des tensions raciales, d’une économie d’assistance sans avenir. Ce sera long pour recoller les morceaux.

Il faudrait que Mayotte s’assume, cherche à vivre par elle même. Quant on compare Mayotte à Maurice dont le PIB par habitant est maintenant inférieur mais qui, indépendant, vit de son tourisme et de son activité sans aide extérieure, on ne peut que constater l’inefficacité du statut de DOM. Il faudrait  que Mayotte rejoigne son environnement, les autres Comores, Madagascar, l’Afrique de l’Est, sorte de son splendide lagon transformé en bastion bardé de radars. Il est hélas difficile de croire le Guadeloupéen Roger Valy–Plaisant qui prophétise ; « Même si, comme un pied de nez fait à l’Histoire, Mayotte semble à reculons en devenant département français, les mêmes causes produisant les mêmes effets, elle sera amenée bien vite à dénoncer son statut, du fait de l’impossibilité de l’assimilation et du non respect de ses spécificités par l’Etat colonial français. »

En attendant, aujourd’hui, le calme est revenu, mais les syndicats ne veulent pas signer le protocole de sortie de crise. L’intersyndicale demande la mise en place d’une « nouvelle société plus égalitaire », vaste programme. La ministre de l’Outremer, Marie-Luce Penchard, a convié à Paris des élus mahorais (parlementaires, président du conseil général...) pour réfléchir à des mesures concrètes afin de relancer l’économie locale ; voyageant aux frais de la princesse ils auront pu faire leurs achats pour Noël. La ministre leur a annoncé un plan de relance de l’économie : l’Etat financera à 100% pour 50 millions d’euros des investissements publics utiles à la population : routes, écoles, alimentation en eau, aides à l’agriculture, aides aux entreprises en difficultés. Rien pour développer le secteur productif. Les représentants syndicaux  n’avaient pas été conviées par la ministre, l’un d’eux sceptique a immédiatement déclaré : "les propositions de la ministre favorisent les nantis".

 Que peut on faire ?

 Apparemment rien, on ne peut pas revenir sur la départementalisation à moins que ce soit Mayotte qui le demande.

Obtenir que le Conseil Constitutionnel reconnaisse l’inconstitutionnalité de la départementalisation faute de consultation du peuple français ?

Mais il a validé la loi de départementalisation.

S’appuyer sur :

- La résolution n° 3385 (xxx) du 12 novembre 1975 qui admet les Comores aux Nations unies comme pays composé de 4 îles dont Mayotte.

- La résolution 31/4 adoptée le 21 octobre 1976 qui rejette :

 a) Toute autre forme de référendums ou consultations qui pourraient être organisés ultérieurement en territoire comorien de Mayotte par la France;

 b) Toute législation étrangère tendant à légaliser une quelconque présence coloniale française en territoire comorien de Mayotte ?

Mais la France est membre du conseil de sécurité et a un droit de veto.

Une autre question va se poser : l’admission en 2014 de Mayotte comme Région Ultrapériphérique de l’Europe. Une demande en ce sens a été officiellement adressée au Président du Conseil Européen. Cette « rupéisation » apporterait à Mayotte d’importants crédits mais elle exige l’unanimité des 27 pays de l’Union Européenne, dont plusieurs ont condamné l’annexion de Mayotte par la France. Peut on penser d’autre part que l’Europe supportera qu’on expulse sans procédure aucune, 26 000 clandestins par an et, si on ne les expulse plus, ne va-t-on pas voir se déverser sur l’ile des foules de Comoriens, de Malgaches voire d’Africains ? Il n’y aura plus alors qu’à évacuer cette île envahie vers la métropole et vers la Réunion. Pour la Réunion ça a d’ailleurs déjà commencé.    

La France a commis, sciemment, une erreur dont elle se mordra les doigts mais qu’on ne voit guère comment réparer.                                                                                                                                                                          A moins que, devant l’échec patent de cette départementalisation, le gouvernement ait le courage de revenir en arrière et que, moyennant un développement économique de l’ensemble de l’archipel, il s’entende avec l’Union Africaine sur un statut respectant les particularités de la culture Mahoraise.

Mais ce qui va probablement se passer, c’est une accélération du processus d’alignement sur les autres DOM, l’Etat achetant à grand frais la paix civile. Et cette île autrefois tranquille, à la culture très particulière, une fois que son âme aura été détruite, deviendra une communauté d’assistés se sentant incompris et dont les meilleurs gagneront la métropole et la Réunion.