02/05/2013
le boomerang Libyen
En décembre 2007, Mouammar Kadhafi, le dictateur Libyen était reçu en grande pompe par Nicolas Sarkozy, président de la République. La France espérait en retour la signature d’une dizaine de milliards d’euros de contrats. En fait, hormis la vente d’une vingtaine d’airbus très peu de choses aboutirent.
En février 2011, dans le sillage du Printemps arabe tunisien, une contestation populaire se transforme en Libye en une révolte armée puis en guerre civile.
Convaincu par Bernard Henry Levy, Nicolas Sarkozy décide d’intervenir avec la Grande Bretagne pour appuyer l’insurrection, le Conseil de Sécurité votant en mars, la résolution 1973 autorisant l’intervention.
Avec l’appui décisif de la France et de la Grande Bretagne aidées par les Etats Unis et l’OTAN, les insurgés Libyens entrent en octobre 2011 à Tripoli la capitale et prennent le pouvoir.
Mouammar Kadhafi en fuite est capturé et exécuté.
La chute du régime de Kadhafi entraine le départ de milliers de mercenaires touareg qui regagnent le Sahel avec d’importants stocks d’armes.
Le Mali est déstabilisé, les touareg du nord accompagnés de mouvements salafistes et d’Al Qaida, mettent l’armée malienne en déroute et menacent l’ensemble du Mali.
En janvier 2013 la France intervient en application de la résolution 2085 des Nations Unies. C’est l’opération Serval qui permet, avec l’aide du Tchad, la reconquête du Nord Mali et l’éradication des mouvements terroristes.
Voilà donc la France en lutte aves les islamistes après avoir aidé au renversement de Kadhafi.
Le 23 avril un attentat, une voiture bourrée d’explosifs, détruit en partie l’ambassade de France à Tripoli, blessant deux gendarmes français.
Quand on fait le bilan de notre intervention en Libye, tribalisation du pays après une guerre civile ayant fait des milliers de morts, déstabilisation du Mali s’étendant à l’ensemble du Sahel, conflits encore en cours, destruction de notre ambassade en Libye, on se dit qu’on aurait mieux fait de ne pas s’en mêler et de laisser la colonel Kadhafi régler son problème. D’autant que nous n’en avons tiré aucun avantage économique.
Que cela nous serve de leçon pour la Syrie.
17:32 Publié dans actualites, Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : kadhafi, libye, printemps arabe, bhl, tripoli, touareg, sahel, mali, al qaida, tchad, islamistes, ambassade, syrie
24/11/2012
Mali:L'indécision française peut-elle déboucher sur la création d’un « Sahélistan » ?
Nous avons plusieurs fois évoqué la situation au Mali et la nécessité pour la France de ne pas laisser s’y installer un foyer terroriste sous la coupe de AQMI et des islamistes djihadistes. Bernard Lugan vient de publier dans son blog son analyse de la question.
« Au mois de janvier 2012, au Mali, la résurgence d’une crise née au moment des indépendances, imposait de fixer l’abcès afin d’éviter sa dissémination et pour ensuite le traiter en profondeur à travers trois volets :
- Politique, en prenant en compte la légitime revendication des populations nordistes, notamment celle des Touareg,
- Diplomatique, en faisant comprendre à l’Algérie que si ses intérêts régionaux n’étaient à l’évidence pas ceux de la France, les nôtres ne s’effaceraient pas devant les siens,
- Militaire, en appuyant les Touareg contre les groupes islamiques qui, à l’époque, totalisaient moins de 300 combattants qui avaient commis l’erreur de sortir de la clandestinité désertique pour se rassembler à Gao et à Tombouctou.
Au lieu de cela, dans la plus totale indécision doublée d’un manque absolu de vision géostratégique, la France :
- S’est réfugiée à l’abri du principe de l’intangibilité des frontières,
- A cédé devant les exigences algériennes de non intervention,
- A camouflé sa pusillanimité derrière l’argument d’une « action » de la CEDEAO, ce «machin », ce «volapuk », cette tour de Babel, dont l’efficacité militaire relève de la méthode Coué,
- A laissé les islamistes liquider militairement les Touareg.
Le résultat de cette addition de démissions décisionnelles est qu’un incendie limité pouvant être rapidement éteint, notamment au moyen d’une de ces opérations « discrètes » que nos forces savent encore si bien mener, est aujourd’hui devenu un foyer régional de déstabilisation. En effet :
1) Le Mnla ayant été militairement défait et repoussé vers la frontière algérienne, les islamistes qui ne risquent plus d’être pris à revers sur leur flanc nord ont désormais toute la profondeur saharienne pour manoeuvrer. Quant à leur flanc ouest, il semble également s’ouvrir car au sein des tribus arabes de Mauritanie, certains, de plus en plus nombreux, commencent à se poser des questions…
2) Sur le flanc oriental la situation leur devient également de plus en plus favorable car le chaos en retour se fait sentir en Libye où tout le sud du pays est mûr pour devenir un nouveau Mali. Quant au sud de la Tunisie, la contamination y a largement commencé.
3) La contagion n’est plus qu’une question de temps au Tchad et au Darfour cependant qu’un continuum fondamentaliste est en passe de s’établir avec les islamistes de Boko Haram du nord Nigeria
Ainsi donc, le « Sahélistan », fantasme il y a encore quelques mois, devient-il peu à peu réalité. L’une de ses forces est qu’il s’agit d’une résurgence historique ramenant directement aux jihad sahéliens du XIX° siècle qui enflammèrent la totalité de la région depuis le Soudan à l’Est jusqu’au Sénégal à l’Ouest. Or, l’islamisme sahélien de 2012 s’abreuve à cette « fontaine de rêve » fermée par la colonisation. Comment cette réalité inscrite dans la longue durée peut-elle être comprise par des journalistes ou des politiciens esclaves de l’immédiateté et de leur inculture ? Comment pourrait-elle l’être par ces «africanistes » élyséens dont la principale activité semble être de torpiller les informations que les militaires font « remonter » depuis le terrain ?
Dans le Sahel, au coeur de ce qui fut notre « pré carré », ceux qui inspirent la politique de la France ont donc laissé s’écrire le même scénario que celui que nous avons connu dans la région des Grands Lacs et qui peut être exposé en quatre points :
1) Une erreur d’analyse reposant sur la priorité donnée aux postulats idéologiques aux dépens des réalités géographiques, anthropologiques et historiques.
2) L’absence de toute véritable stratégie de défense.
3) Le tropisme de l’abandon de nos alliés ou amis.
4) La place laissée libre à des acteurs extérieurs. Dans le cas présent, l’Algérie et les Etats-Unis qui attendent le moment propice pour intervenir, mais à leur manière. Les conséquences de l’incompétence hexagonale seront alors camouflées sous l’alibi facile de «complot anglo-saxon » contre les intérêts français...
Alors que tout ce qui se passe dans la zone concernée nous est connu, alors que nous savons tout, et au-delà, de ceux qui la déstabilisent, alors que nous y disposons de tous les réseaux utiles, alors enfin que, parfaitement immergées, nos forces auraient pu rapidement « régler » le problème, l’Elysée a laissé la situation lui échapper.
Faut-il s’en étonner quand la tête de l’Etat dodeline entre indécision et repentance ? »
Bernard Lugan 23/11/12.
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16:14 Publié dans actualites | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mali, touaregs, djihad, al qaida, algérie, aqmi, cedeao, sahel